RnD Café ☕️ – #396
Adopter ou décrocher : l’IA creusera-t-elle la fracture numérique ?
Bonjour à tous,
Un RnD Café plus court cette semaine, non que les annonces aient ralenti mais télescopage de planning de mon côté.
Comme chaque fois désormais, voici un résumé de la trentaine de sources de la semaine ici en version Podcast NotebookLM.
Cela dure 7’40, c’est toujours brut de décoffrage et sans aucune édition.
Voici donc quelques points marquants repérés cette semaine :
- Où en sommes-nous de l’adoption réelle de l’IA dans nos organisations ?
- L’IA va-t-elle nous rendre stupides ? Le sujet du risque cognitif de l’IA (mais aussi des opportunités) est particulièrement remonté cette semaine
- Une discussion croisée que j’ai eue avec Arne de Keyser, professeur à l’EDHEC sur le sujet du futur de la relation client
- Un focus sur les assistants, ces fameux agents dont on parle de plus en plus, semaine après semaine (Agentic AI)
Adoption de l’IA : entre prise de conscience et fracture numérique
En France, l’adoption de l’intelligence artificielle dans les PME et ETI avance à deux vitesses. Si 58 % des dirigeants considèrent l’IA comme un enjeu de survie à horizon 3-5 ans, seuls 43 % ont mis en place une véritable stratégie.
Ce décalage s’explique par des freins liés à la formation, à l’âge ou au genre, révélant une fracture d’appropriation technologique.
L’écart entre la perception stratégique et l’action opérationnelle souligne l’urgence d’accompagner les entreprises dans le déploiement concret des usages IA.
Malgré l’enthousiasme ambiant, une partie du tissu économique reste à la traîne, mettant en lumière les risques d’un fossé croissant en matière de compétitivité et de transformation digitale.
Je fais partie de ceux qui estiment que la formation à l’IA est une cause nationale. Il ne faut pas reproduire la fracture numérique des années 2000.
L’IA dans les PME et ETI françaises : une révolution tranquille

IA et travail : entre gain de productivité et dette cognitive
1. Recherche d’information : la donne change
L’usage de ChatGPT dépasse désormais celui de Wikipédia, signalant un basculement dans la manière dont nous accédons à l’information. Parallèlement, l’expérience de recherche sur Google s’érode : 58,5 % des requêtes aux États-Unis se terminent sans clic, tandis que les AI Overviews de Google diminuent les taux de clics d’environ 30 %.
À retenir :
- utilisez des outils pour surveiller la présence de votre marque dans les résultats des LLM
- adaptez vos contenus et votre structure de site pour rester visible par les LLM
Pub : nous pouvons vous aider sur ces deux points. Fin de Pub.
2. Hyperconnectivité et journée de travail infinie
Une étude de Microsoft sur les tendances du travail a identifié l’émergence des Frontier Firms : des entreprises propulsées par l’intelligence artificielle, organisées autour d’équipes mixtes humains-agents, où chaque collaborateur devient un « agent boss ». Ca me fait penser à cette phrase entendue : « Les DSI vont devenir les DRH des agents intelligents ».
Mais cette transformation ne peut pas se limiter à une simple refonte des processus. L’analyse de Microsoft – issue de milliards de signaux anonymisés de Microsoft 365 – met en lumière une dure réalité : la « journée de travail infinie » avec une charge mentale incroyablement lourde.

L’IA peut probablement nous aider à sortir de cette impasse, à condition que nous l’intégrions dans un nouveau rythme de travail.
Sinon, elle risque simplement d’accélérer un système déjà dysfonctionnel. Comment ? Les assistants IA sont une réponse (voir ci-dessous).
À retenir :
- Analysez vos tâches répétitives qu’un process automatisé ou qu’un (mini) agent pourrait prendre en charge.
- Les LLM (Claude, ChatGPT) peuvent désormais se connecter à votre messagerie (en local)pour vous aider à trier vos emails.
3. « Dette cognitive » : alerte sur les effets neurologiques
Une étude récente du MIT révèle que les utilisateurs réguliers de ChatGPT sous-performent systématiquement sur les plans linguistique, cognitif et comportemental. L’IA réduit de 55 % la charge mentale nécessaire à la rédaction, provoquant une forme d’atrophie cérébrale et une dépendance structurelle. 83,3 % des utilisateurs de ChatGPT soumis au test de l’étude sont incapables de citer des passages d’essais qu’ils avaient rédigés quelques minutes auparavant.Les utilisateurs assimilent aussi inconsciemment les biais algorithmiques, ce qui affaiblit leur capacité critique et leur autonomie intellectuelle. Et l’on revient sur le concept évoqué ici, en avril, de AI Laziness (paresse cognitive).
Comment faire pour rester alerte ?
La notion d’hygiène cognitive devient une priorité. Il s’agit de cultiver activement la capacité de concentration, d’analyse, de déduction et de créativité – des compétences qui risquent de s’éroder si l’IA fait tout à notre place. L’IA ne doit pas devenir une béquille mais un levier de renforcement intellectuel : apprendre de nouvelles choses, échange, co-création…
Le post de Benoit Raphaël, cette semaine, qui mettait en avant les travaux du philosophe Bernard Stiegler était éclairant à ce titre, définissant les « prolétaires » comme ceux qui « ne comprennent plus rien », désindividués par les machines qui automatisent leur savoir.
Cependant, la technique est aussi un « pharmakon », à la fois « toxique et curative », pouvant déprolétariser si elle est « appropriée collectivement ». Il est nécessaire de « ne jamais lâcher sur la compréhension de ce qui se joue et de comment ces machines fonctionnent » et d' »apprendre à les maîtriser pour augmenter notre expertise, pas la remplacer. »
4. Continuons à nous former -> Optimisation des prompts : du « prompt engineering » au « context engineering »
Les études montrent que les LLM fonctionnent mieux avec des instructions structurées, des étapes intermédiaires et une intention explicite. Mieux encore : c’est le contexte plutôt que l’instruction qui détermine la qualité des réponses.
D’où l’émergence du concept de context engineering, remettant l’humain au centre de la performance des IA.
Un contexte trop lourd ou brouillon est considéré comme le meilleur moyen de perdre ce contrôle. Lire l’analyse de Benoît Raphaël ici.

Pour action :
Lorsque nous commençons à concevoir un chatbot sur mesure pour nos clients, l’enjeu est de tirer parti du meilleur des deux mondes — on parle alors de RAG (Retrieval-Augmented Generation) :
- la capacité conversationnelle d’un chatbot fondé sur son propre corpus,
- et la puissance d’un accès structuré à vos données internes et ce dans le respect de votre confidentialité
Le réflexe courant est de vouloir fournir un maximum de données à l’outil, en comptant sur l’IA pour faire le tri. C’est faisable, mais souvent inefficace : cela consomme du temps, mobilise des ressources et n’assure pas forcément un meilleur résultat.
C’est pourquoi il est essentiel — même si cela semble relever du bon sens — de commencer par le « Start with Why », concept popularisé par Simon Sinek. Il s’agit d’identifier clairement la raison d’être du projet, afin de donner du sens, d’aligner les décisions et de fédérer autour d’une vision commune.
C’est la meilleure façon de cartographier les données utiles à vos objectifs. Faire moins, mais mieux.
Tips de la semaine pour vos prompts :
- ce mega prompt pour vous aider à tirer le meilleur parti d’un LLM pour lancer une recherche approfondie
- Ruben Hassid propose un « filtre de réalité« pour ChatGPT, en utilisant les instructions personnalisées afin de limiter les risques d’hallucination. Ces consignes peuvent être configurées directement dans les paramètres de personnalisation du modèle.
L’IA et les émotions : quelle expérience client en 2050 ?
Nous avons échangé avec Arne de Keyser, professeur à l’EDHEC lors d’un regard croisé pour EDHECVox sur le futur de l’expérience client.
On y parle parcours, impact de la voix, discernement, risque et opportunités.


Les assistants « intelligents »
Quelques news cette semaine sur le sujet.
- Google permet désormais de créer gratuitement son propre assistant IA, appelé « Gems », en 3 minutes et sans compétence technique. Ces assistants peuvent répondre à partir de bases de connaissances internes, transformant la manière de travailler avec l’IA. Démo par Louis Graffeuil ici + son post sur les étapes pour créer un agent.
- ChatGPT a lancé une mise à jour majeure pour son application Mac, permettant l’enregistrement vocal, la transcription en direct, la synthèse avec des éléments d’action, et des questions ouvertes. Cette fonctionnalité, avec sa « mémoire d’agent », pourrait rendre obsolètes de nombreuses startups spécialisées dans la prise de notes, la transcription de réunions et les assistants intelligents. « L’assistant du futur n’est pas un autre outil. Il est déjà sur votre bureau. »

- Quel est par exemple l’avenir de Superwhisper– un outil de retranscription vocale ultra-réactive et fidèle que j’utilise sur mon ordinateur – est désormais disponible sur Windows, permettant de parler à son IA de manière plus rapide et efficace. Démo ici
- Plus de 150 000 GPTs sont disponibles dans le GPT Store, offrant diverses fonctionnalités allant de l’analyse de données à la génération de présentations et de vidéos. Il est également possible de construire ses propres GPTs sans coder. Comment choisir les 10 qui comptent ?
- Vers où allons-nous ? A Vivatech la semaine dernière, c’est Yann LeCun, l’un des pères fondateurs de l’IA et Chief AI Scientist chez Meta, qui a pris la parole. Il rejette le terme AGI (Artificial General Intelligence) et lui préfère deux concepts : l’ASI (Artificial Super Intelligence), pour désigner des machines surpassant l’humain dans la plupart des domaines, et l’AMI (A friendly AI assistant), un assistant intelligent combinant planification, raisonnement, mémoire et sécurité. Il estime que d’ici cinq ans, les IA pourraient atteindre un niveau cognitif équivalent à celui d’animaux comme les chats ou les rats.
Outils Vidéo
Quelques infos rapides sur les outils qui vont optimiser nos processus de création.
- MidJourney, le précurseur de la génération d’images (juillet 2022) avait annoncé la semaine dernière l’arrivée de son modèle vidéo. C’est chose faite. Depuis jeudi matin, tout le monde s’en donne à cœur joie et peut tester la génération de vidéo. Les vidéos montrent une « fluidité hallucinante » et la capacité de les étendre jusqu’à 20 secondes pour un coût « dérisoire ». Son esthétique est décrite comme « totalement nouvelle ». Je vous laisse vous faire votre opinion. Gardez juste en tête que toutes ces vidéos sont produites uniquement avec une consigne texte…
Exemple 1, exemple 2,
- Intéressant aussi de comprendre que les modèles de génération vidéo prennent de mieux en mieux en compte les lois de la physique. Ici avec Veo3 de Google et ce prompt : « three toy ships, one made of iron, the other of wood, and one out of loosely packed sugar, are dropped into a pool of water«

- L’ASMR qui fait fureur sur les réseaux sociaux est désormais potentiellement produite par l’IA sur des concepts impossibles. Cette vidéo d’une fraise (entre autres) a fasciné 22 millions de spectateurs en 5 jours…

Très bon week-end à toutes et à tous et bonne Fête de la Musique !
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